Donner un droit commun au Commun : instaurer l’Association Communautaire et la Communauté Civile

Commun, essai sur la Révolution au XXIème siècle, de Pierre DARDOT et Christian LAVAL

 

 

A l’occasion de la consultation publique sur le projet de loi LEMAIRE sur le Numérique, un article définit le domaine commun informationnel.(http://www.republique-numerique.fr/consultations/projet-de-loi-numerique/consultation/consultation/opinions/section-1-les-communs/article-8-definition-du-domaine-commun-informationnel).

 

Le Droit connaît depuis Rome les biens communs, la res communis, catégorie juridique de biens ne pouvant faire l’objet d’appropriation privative car d’usage commun. Mais la Révolution Française a établi la grande distinction entre bien privé et bien public, considérant cependant comme une exception nécessaire certaines choses devant par nécessité ne faire l’objet d’aucune appropriation exclusive. L’eau et l’air sont les exemples typiquement avancés dès que l’on parle de bien commun. En effet, il existe bien des servitudes de passage d’eau qui interdisent à un propriétaire d’un terrain privé d’établir des barrages sur son cours d’eau tandis qu’il dessert une propriété voisine par exemple. De même, commander un verre d’eau dans un bar est gratuit, car l’usage de cette ressource est libre. Enfin, le service public de l’eau n’est payant qu’en ce qui concerne l’approvisionnement de l’eau courante dans les habitations. L’eau n’est sujette d’appropriation par personne, seule sa consommation permet de déterminer le prix de l’entretien dévolu aux usagers du réseau.

Cependant, depuis la Chute du Mur de Berlin et le renouveau des communs, une nouvelle définition semble poindre s’agissant des biens communs. Ainsi, il ne s’agit plus de définir une catégorie juridique de biens, mais de définir une catégorie de droits se rapportant à des biens érigés en commun. Le projet de loi sur le Numérique ne fait que conforter cette nouvelle définition en précisant la relation entre le bien, la personne qui l’utilise et la communauté qui le gère.

Selon le projet de loi, un type de bien clairement défini se voit assujettir un régime particulier, celui du domaine commun informationnel. Ce domaine est défendu par une Communauté représentée par les associations agréés ayant pour objet la diffusion des savoirs ou la défense des choses communes, dans un intérêt d’en préserver l’héritage ou le patrimoine de tous, de le garantir pour l’avenir. Les personnes qui souhaitent s’approprier un bien de ce domaine pourraient en conséquence se voir traînées devant les juridictions par ces associations afin de garantir l’usage commun de la ressource.

Ce projet de loi est cohérent et est une très bonne avancée pour la reconnaissance en droit français des nouveaux communs.

Toutefois, les communs ne sont pas tous présents sur les réseaux numériques. Ce projet n’est en forme qu’une garantie supplémentaire de la libre circulation des idées et des opinions, garanties par la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789.

S’agissant des biens matériels, un individu pourrait parfaitement se voir astreint par une communauté à utiliser en commun d’un bien devenu une ressource, afin de le préserver pour en assurer sa conservation.

Une copropriété par exemple, en suivant cette définition, se trouve être un Commun. La communauté des propriétaires est astreinte à des obligations communes et égales pour chacun de ses membres, elle prend en charge les obligations portant sur l’organisation des parties communes, qui ne peuvent faire l’objet d’appropriation privative.

De même un réseau de chaleur ou une coopérative de production électrique peuvent se voir qualifiés de Commun.

Cependant, une multitude de régimes juridiques sont applicables et ne permet d’apercevoir la cohérence et l’homogénéité des communs dans un ensemble. Afin de les fédérer, un régime unique semblerait pertinent pour répondre aux mêmes besoins des communs.

Une association de personnes se constitue en voulant assurer la préservation d’un bien qu’elle utilise et garantir ainsi son héritage. 

- Le droit privé et l’Association Communautaire.

Une association de la loi 1901 pourrait répondre à cette objet social, mais, selon le projet de loi LEMAIRE, elle devra nécessairement se voir reconnaître par un agrément le droit d’assurer la conservation du domaine commun informationnel. Cependant, je pense qu’il est nécessaire de reconnaître dès la constitution de l’association son caractère de protection du bien sans nécessité de reconnaissance extérieure, d’agrément public.

Il est donc nécessaire de créer une nouvelle association : l’Association Communautaire. Cette association de droit privé aura la charge d’ériger un bien en ressource partagée pour le préserver. Une centrale de production de chaleur, un tiers-lieu utilisé par des auto-entrepreneurs en espace de co-woking, un atelier bénévole de réparation et d’utilisation de véhicules de collection, un jardin privé partagé, une flotte de véhicules pourraient être autant d’exemples de biens pris en charge par une Association Communautaire.

Les membres de l’association s’engagent à contribuer, en plus des charges monétaires, et à agir de concert à la préservation du bien commun dans le cadre d’une action concertée. Ce bien se voyant inappropriable par un des membres de la communauté, il appartiendrait au patrimoine de l’association.

Cependant, si l’association envisage d’étendre l’inaliénabilité du bien commun au-delà des membres de sa communauté, il conviendra alors qu’elle obtiennent la reconnaissance par la personne publique de cette prérogative. Ainsi, une Communauté Civile serait une Association Communautaire qui est passée du statut de personne morale de droit privé à celui de personne morale de droit public.

- Le droit public et la Communauté Civile.

De par ce nouveau statut, la communauté érige le bien commun dans la catégorie des bien publics, inaliénables, incessibles et imprescriptibles, mais garderait l’usage exclusif du bien. A l’image des Sections de communes (http://www.collectivites-locales.gouv.fr/place-votre-commune-dans-paysage-institutionnel-administrer-sections-commune), les membres de la communauté, les ayants-droits, disposeraient de la jouissance du bien, sans en avoir cependant la possibilité d’appropriation privative, et garderaient la responsabilité de l’administrer pour en assurer l’héritage.

Un éco-quartier disposant d’un réseau de chaleur par géothermie pourrait se voir confier la gestion du service public particulier du chauffage. L’éco-quartier serait ainsi une Communauté Civile composée non pas des propriétaires des immeubles, mais par les ayant-droits maîtres d’usage : les occupants réels des lieux (les entreprises, les locataires, les propriétaires occupants, etc…). Charge à lui de le gérer, avec l’assistance technique de la Commune par exemple, ou bien de choisir un délégataire de service public. La géothermie étant une ressource commune, mais dont l’usage est à préserver oblige des comportements et engagements mutuels de la part de tous les ayants-droits maîtres d’usage.

Une Communauté Civile pourrait être associée à l’organisation des services publics de l’eau, du gaz ou de l’électricité, voire même se voir confiée l’administration d’un bien public. Des fermes urbaines pourraient se voir ainsi investie de certaines prérogatives pour préserver leurs droits.

La reconnaissance par la personne publique est nécessaire car la Communauté Civile, de par sa composition, ne peut pas entreprendre une mission de préservation d’un bien public sans disposer de prérogatives de puissance publique. Le Conseil Municipal de la Commune pourrait être ainsi à l’initiative de la création d’une Communauté Civile. Au contraire, et afin de protéger les droits des ayants-droits et la ressource commune, l’instauration d’une telle Communauté par la société civile serait reconnue par le Préfet du département.

Les relations entre la Commune et la Communauté Civile seraient définies par un contrat de Communauté.

 

Communauté Civile et Association Communautaire sont les deux facettes, l’une en droit public, l’autre en droit privé, de la reconnaissance de droits particuliers à une communauté d’utilisateurs, d’ayants-droits, de maîtres d’usage ou de citoyens tout simplement qui souhaitent agir en commun pour user d’un bien devenu ressource et d’en assurer la conservation à des fins d’héritage pour les générations futures.

Pour se faire, il est nécessaire que le Parlement vote une proposition de loi tendant à l’instauration d’une Association Communautaire et à la création d’une nouvelle personne morale de droit public, la Communauté Civile.

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